Riesling – 2002
Riesling Muenchberg 2000
Riesling "cuvée particulière" 1996
Riesling "Cuvée Frédéric Emile" 1995
Riesling 1988 Wehlener Sonnenuhr Auslese
Riesling Grand Cru Kastelberg 1989
Riesling Grand Cru Kitterlé 1985
Riesling Grand Cru Altenberg 1996
Riesling Vendanges Tardives 1995
Les vins ont tous été dégustés à l’aveugle et dans les meilleures conditions possibles, un membre de club (qui animera la dégustation) reçoit des informations quant à la préparation des vins, température de service, carafage, ouverture…
A propos des Grands Crus
Cette typicité du terroir est sévèrement préservée par des règles particulières de production (degré minimum naturel, rendement maximum, étiquetage…) et notamment seuls peuvent y être plantés les 4 cépages alsaciens les plus renommés : riesling, gewurtztraminer, tokay pinot gris et muscat.
Les vins d’appellation Alsace Grand Cru représentent environ 4 % de l’ensemble des vins d’Alsace.
Un remaniement de ces règles a été opéré en 2001, afin de renforcer la notion de qualité ; outre la réduction des rendements, l’augmentation des degrés imposés sur les vendanges tardives et SGN, la prédominance est maintenant donnée aux terroirs.
Les viticulteurs et leurs terroirs
1) Domaine Ostertag
André Ostertag a réellement choisi d’être vigneron : d’abord par vague nécessité, puis peu à peu par vocation réelle. Aujourd’hui, la passion de la vigne et du vin le cheville à sa terre, aussi sûrement que plusieurs mètres de racines soudent un cep au sol.
Résident à Strasbourg – tout près de la cathédrale aimée – et prenant chaque jour le chemin de sa cave, André Ostertag, vigneron de la ville et des champs, n’est pas tout à fait un producteur comme les autres. Non-conformiste méthodique, il a bousculé les habitudes anciennes, les choix œnologiques, et surtout le discours du vin, domaine où il excelle. Il fut ainsi le premier, avant que beaucoup d’autres ne s’y engouffrent, à avoir instauré une pertinente distinction entre les « vins de fruit » – vins exhalant le cépage, dans la tradition rhénane – et les « vins de pierre » – vins cristallisant le terroir d’origine, dans une inspiration plus française.
La propriété ne comptait encore qu’un seul hectare, dans les années 60, quand Adolphe Ostertag décida de l’exploiter réellement. Multipliée aujourd’hui par dix. On y recense trois coteaux majeurs. Le Fronholz, le Muenchberg – pierre féminine au grain soyeux et chaud, dont est faite la cathédrale de Strasbourg – ,le Heissenberg et le reste du vignoble familial, sont cultivés avec un réel souci de limiter les rendements, de disposer d’une matière première saine, qu’on récolte à son équilibre optimal, et de préserver un patrimoine de vieilles vignes.
André Ostertag s’est en effet distingué par quelques principes personnels de vinification, ne pratique plus aucune filtration. Cette non-filtration « permet de sauvegarder l’épiderme du vin, et lui assure une plus grande complexité aromatique et tactile ».
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni.
Le Muenchberg Grand Cru – Un terroir exceptionnel
Abrité des pluies et des vents d’Ouest par l’Ungersberg, une butte-témoin de grès vosgien qui culmine à 901 m, le Muenchberg épouse les courbes d’un croissant pour mieux accueillir et retenir le soleil. Installé de part et d’autre d’un vallon orienté au Sud, il bénéficie sur ses 17,70 ha d’un microclimat unique. Le sol et le sous-sol sont formés de sédiments vieux de 250 millions d’années.
Grand cru classé en 1992. Superficie : 18 hectares. Exposition : sud. Ce « mont des moines » tire son nom d’une ancienne implantation cistercienne, celle de l’abbaye de Baumgarten. Le site, dérobé aux yeux des passagers de la « route du vin », est d’une grande beauté. Sol et sous-sol sont riches en matériaux volcaniques et sédiments primaires ; le grès rose, dominant, donne une terre pauvre et sableuse, se réchauffant rapidement. La forme en amphithéâtre du coteau, son orientation plein sud, la protection des reliefs circonvoisins déterminent en outre un microclimat chaud, d’allure méridionale. Ces terrains caillouteux et sableux fournissent un sol pauvre, mais où le drainage est excellent et le réchauffement rapide. Comme la fertilité y est faible, la vigne produit peu de raisins : elle en concentre les qualités.
Extrait de CIVA et « Le Grand livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni.
2) Domaine François Lehmann
M. Lehmann est en possession d’un petit domaine de 3 hectares à Riquewihr doté de parcelles somptueusement exposées. L’une d’entre elles se trouve sur la partie haute (plateau) du Grand Cru Schoenenbourg. Les vignes sont bichonnées, soignées avec intelligence et talent.
La personnalité de ce viticulteur s’exprime au travers de ces vins ; ceux-ci sont assez réservés dans leur jeunesse, mais dévoilent d’ores et déjà une extrême finesse. Au vieillissement, ils révèlent une personnalité et une race étonnante. La presse spécialisée et les amateurs de Grands Vins sont unanimes quant aux mérites de M. Lehmann ; celui-ci reste cependant très humble et se gêne même de ce que ses confrères viticulteurs, pourraient lui envier. Il n’en reste pas moins que M. Lehmann nous procure beaucoup de plaisir, lors des dégustations au caveau et beaucoup de joie à servir ses vins à table entre amis.
3) Le domaine F.E. Trimbach
Nichée au pied du coteau, là où se rejoignent les vignes du Geisberg et de l’Osterberg, la maison Trimbach, avec son amusante tour à colombage qui joue la vigie à l’entrée de la ville, fait partie intégrante du paysage ribeauvilléen.
Les Trimbach, selon la terminologie alsacienne, sont producteurs-négociants. En réalité, ils illustrent la tradition d’un négoce éclairé, classique dans ses méthodes, prudent dans ses évolutions, jouant son nom sur la qualité et la régularité d’une gamme personnelle de haut niveau.
Versant producteur, les Trimbach sont à la tête de 21 hectares en pleine propriété, répartis sur les communes de Ribeauvillé, Hunawihr, Bergheim et Rorschwihr. Sur 18 hectares en production, le riesling (7 hectares) et le gewurztraminer (5 hectares) dominent largement, suivis de l’auxerrois (2,5 ha), du pinot noir (1,5 ha), du pinot gris (1 ha), du sylvaner et du muscat (0,5 ha chacun). Les joyaux de la maison sont trois grands crus, dont les noms sont délaissés sur l’étiquette, au profit de noms de marque (et de clos dans le cas présent). Sur Ribeauvillé, c’est l’exigu Geisberg, dont les Trimbach possèdent 62 ares, plantés en vieilles vignes de riesling, qui ont dépassé leur cinquantième année. C’est également l’Osterberg, avec 3 hectares de vignes plus que trentenaires de riesling, gewurztraminer et pinot gris. Ces deux crus, en riesling, sont rassemblés dans la célèbre Cuvée Frédéric Emile, l’un des orgueils de la maison . Sur Hunawihr, c’est enfin le Rosacker, où les Trimbach dorlotent 1,40 ha de riesling, sur le célèbrissime Clos Sainte-Hune, dont ils détiennent le monopole. Ici comme là, les vignes sont travaillées un rang sur deux (un rang bêché l’hiver, puis griffé, l’autre désherbé), et les rendements du riesling sont maintenus de façon à ne pas excéder 50 hl / ha.
Sérieux, équilibrés, lents à se délier, les vins de la maison Trimbach cultivent à la perfection le classicisme alsacien. Les cuvées de base sont nettes, droites, caractérisées. Les Trimbach sont de grands spécialistes du Riesling : leur deux cuvées de prestige sont là pour le prouver. Conjuguant les nuances argilo-calcaires et marneuses du Geisberg et de l’Osterberg, la Cuvée Frédéric Emile réside de l’assemblage des deux provenances, vinifiées par parcelles séparées. C’est un vin puissant, racé, qui développe avec le temps ce goût marqué d’hydrocarbure propre aux deux crus.
Le Geisberg :
Grand cru classé en 1983. Superficie : 8,53 ha. Exposition : sud. Entièrement étayé par des murs de grès, qui composent autant de jardinets de vignes qui surplombe les pittoresques toitures de la vieille ville. Sa forte pente rend nécessaire la culture en terrasse à une altitude de 250 à 350 m. Il regarde le plein sud et se réchauffe d’autant plus que la pierre des terrasses emmagasine efficacement la chaleur solaire. Son substrat est composé de marnes et de dolomies du Muschelkalk, donnant une couverture argileuse très caillouteuse. Ce terroir assez exigu est le domaine d’élection du riesling. Ce cépage fournit là un vin de très grande race, minéral, corsé, qui peut défier le temps. Des qualités typiques : vin de garde, le Riesling Alsace Grand Cru Geisberg développe au fil du temps, un corps puissant, une grande finesse d’arôme, et ce célèbre « goût de vieux Riesling » si original et très recherché.
L’Osterberg
Grand cru classé en 1992. Superficie : 25 hectares. Exposition : est, sud-est. Situé dans le prolongement oriental du Geisberg, l’Osterberg le bien nommé apparaît, par contraste avec son voisin, comme un cru très vaste. Ses pentes, de déclivité moyenne, s’étagent entre 250 et 350 mètres. Argileux et pierreux comme dans les crus voisins, son sol repose sur un substrat marneux du Muschelkalk, auquel s’ajoutent – dans la partie la plus orientale – des marnes et calcaires dolomitiques de la Lettenkohle. Des qualités typiques : vin de grande garde, le Riesling développe un corps puissant, une grande finesse d’arômes et le fameux goût de « vieux Riesling ». Si le Riesling l’emporte, avec des vins typés et gagnant avec l’âge, le Gewurztraminer et le Tokay-Pinot gris montrent ici des dehors particulièrement élégants et généreux.
Extrait du « Le Grand Livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni.
4) Dr Loosen
L’intégralité du vignoble de 11,6 ha est situé sur les rives de Moselle, proche du village de Bernkastel ; il est essentiellement composé de Riesling.
Mr Ernst Loosen (propriétaire) et Bernhard Schug sont les chevilles ouvrières du Domaine et sont considérés comme les « Papes » du Riesling allemand. Ils ont su redonner leur titre de noblesse aux Grands terroirs de Mosel, tel que Erdener Prälat ; Erdener Treppchen, Ürziger Würzgarten et le remarquable Wehlener Sonnenuhr ; dont les schistes bleus peu profonds et rocheux donnent tant d’élégance et de finesse au Riesling.
Le bouillant Mosellan Ernie Loosen produit des vins secs très purs, qui n’ont plus la lourdeur que l’on pouvait reprocher à la tradition locale. Les moelleux ont une fraîcheur de fruit qui rappellent les origines du vinificateur. Le terroir s’exprimera d’autant mieux au long vieillissement.
Particularités des vignobles de Mosel, Saar, Ruwer : (Extrait de RVF Avril 2001.)
Plus de la moitié du vignoble est planté en riesling. Ce ne fut pas toujours le cas. L’Elbling a dominé pendant de nombreux siècles le vignoble, et certains vignerons affirment même qu’il aurait été planté par les Romains. Il est fort probable que le riesling soit venu de la vallée toute proche du Rhin où on a des traces de son existence sous ce nom depuis le Xve siècle. Les vignobles de l’Eglise ont été les premiers à l’essayer et la qualité du vin fut telle que tous les propriétaires ambitieux ont été encouragés dès le départ par l’administration napoléonienne. Un immense travail de remembrement, de construction de murs et de chemins de vignes, a conduit dans les années soixante-dix à de nombreuses replantations sur port-greffe américains, mais, dans les cœurs historiques, on trouve encore de nombreuses parcelles de très vieilles vignes franches de pied qui donnent un nectar incomparable. En effet, le phylloxéra ne se plaît pas dans des sols trop schisteux et laisse les vignerons tranquilles sauf dans la Sarre, une partie de la Ruwer et dans le secteur de Trittenheim et Pisport. Les vignerons ont en général soin de l’environnement et évitent les pesticides et les molécules chimiques trop fortes. Quelques avant-gardistes commencent un programme de lutte raisonnée et ont recours à la confusion sexuelle pour combattre les vers de la grappe. Mais, comme en Bourgogne, l’individualisme règne et les grands crus sont partagés en une infinité de petites parcelles, taillées et cultivées différemment. Etant donné que les vignerons aiment mettre leur nom sur des petits panneaux le long des chemins, le visiteur pourra juger de lui-même de la discipline de travail de chacun d’entre eux ! Les vendanges commencent généralement en octobre et durent huit à dix semaines. Le principe est ici la vendange sélective selon le degré de maturité des raisins. On récolte rarement des grappes entières mais des parties de grappe et souvent des grains de maturité différente, correspondant aux différentes catégories définies par la loi. A chaque millésime, le vigneron ambitieux tente d’atteindre au stade ultime avec des baies complètement botrytisées : souvent, il n’arrive qu’à produire trois litres par jour d’un nectar incomparable, mais qui ne doit pas faire oublier que 80 % de la production est vendangée aux alentours de 10°C.
Il est temps pour le public français de réapprendre que l’on produit en Allemagne quelques-uns des vins blancs les plus fascinants de la planète.
Wehlen : ce petit village est mondialement célèbre en raison de son fameux coteau du Sonnenuhr qui, de l’avis général, donne le vin le plus finement fruité de toute la Moselle.
Extrait de RVF Avril 2001.
5) Domaine André et Rémy Gresser
Situé à Andlau, adorable petite cité entourée de magnifiques coteaux aux caractères géologiques affirmés, le domaine en possède une large palette. A sa tête, Rémy Gresser est l’avocat passionné de ses terroirs en particulier et de la viticulture alsacienne en général. Toujours aussi passionné par le métier de vigneron, qui n’est pas loin de relever du sacerdoce, Rémy Gresser met en pratique ses diatribes en préservant les densités de ses vins, qui sont donc dotés d’une solide constitution, ce qui n’est pas si courant en Alsace. Les amoureux du riesling seront bien servis car ils pourront se livrer à une véritable étude de terroirs dans un vaste choix entre Andlau, Wiebelsberg, Moenchberg et Kastelberg. Nombre de vins sont vendus avec un vieillissement de plusieurs années, ce qui est aussi peu courant, même si la rotation s’accélère, succès du domaine oblige. Soucieux de la qualité des raisins, Rémy Gresser s’est engagé dans un autre combat avec l’association Tyflo qui regroupent les vignerons alsaciens qui respectent un cahier de charge précis. (Respect des sols, …)
Extrait de Guide Bettane & Desseauve.
Le Kastelberg Grand Cru
Grand cru classé en 1983. Superficie : très exactement 5,82 ha. Exposition : sud. Le Kastelberg s’élève directement à l’aplomb du cœur historique d’Andlau. C’est un petit mont très abrupt, dont la pente dévale vertigineusement – entre 300 et 240 mètres d’altitude, pour ce qui concerne la partie grand cru – jusqu’à Andlau, qui coule bruyamment à ses pieds. Un vieux kiosque, juché à son sommet, lui donne sa note pittoresque. Le Kastelberg repose sur un substrat tout à fait unique en Alsace, le schiste de Steige, une formation de l’époque primaire, constituée principalement de lamelles de mica, de grains de quartz et de chlorite. La pauvreté du sol, sa particulière résistance à la sécheresse, l’orientation et la déclivité du coteau, l’étroit encadrement montagneux, le rafraîchissement qu’apporte la rivière, tous ces facteurs se conjuguent admirablement pour donner un terroir réellement exceptionnel.
Le Kastelberg, qui fut probablement viticole dès l’époque romaine, était vanté pour la qualité de son vin dès 1064. Voué depuis longtemps au riesling, il est, aujourd’hui, entièrement planté dans ce cépage.
Le vin du Kastelberg est le type achevé du grand Riesling minéral : sobre et austère à ses débuts, royalement charpenté, d’une fraîcheur tranchante, il restitue peu à peu l’essence de son schiste natal en une matière et un bouquet d’une pénétrante minéralité. Bien évidemment, c’est un vin de longue garde.
Extrait du « Le Grand Livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni.
6) Domaines Schlumberger
Postés, telle une formidable sentinelle, à l’orée méridionale du vignoble, les Domaines Schlumberger continuent à assumer résolument leur rôle de premier propriétaire-récoltant d’Alsace. C’est Eric Beydon-Schlumberger, qui poursuit aujourd’hui l’œuvre familiale, à la tête d’une entreprise de 65 personnes.
Couvrant 140 hectares d’un seul tenant, le vignoble nappe majestueusement les coteaux qui dominent Guebwiller, enrobe la pointe montagneuse de l’Oberlinger en dessinant le vigoureux éperon du Kitterlé (22 hectares), s’épanouit face à la plaine d’Alsace (Kessler, 24 hectares ; Spiegel, 5 hectares), avant d’aller flirter avec elle sur le replet mamelon du Saering (21 hectares).
L’ensemble du vignoble accorde une large prédominance aux cépages nobles, parmi lesquels gewurztraminer (32 %) et riesling (23 %) occupent le devant, le premier s’épanouissant plutôt en haut de côte, le second en pied de coteau. Si Eric Beydon-Schlumberger, à son installation, en 1971, a dû procéder à d’importantes replantations, le domaine conserve de belles parcelles de vieilles vignes, certaines mêmes d’un âge avancé, comme de vénérables ceps plantés en 1912, qui délivrent chichement, chaque automne, 15 à 20 hectolitres à l’hectare d’un jus superbement concentré. Les rendements, globalement, restent très raisonnables : ici l’on se plaît à souligner que le domaine, bien que représentant 1 % du vignoble alsacien, ne produit que 0,5 % du vin d’Alsace.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni
Le Kitterlé Grand Cru
Grand cru classé en 1983. Superficie : 26 hectares. Exposition : sud-est, sud, sud-ouest. Proue avancée du massif de l’Oberlinger, le Kitterlé ressemble à une pyramide, vouée au culte solaire. Hachuré de murs roses qui sont autant de gradins s’élevant vers le ciel, il offre ses flancs à la course complète du soleil, du levant jusqu’au couchant. Une pente très escarpée (270 à 360 mètres d’altitude) et la barrière montagneuse le protégeant des vents du nord ne font qu’accentuer la chaleur naturelle du coteau, qui sait malgré tout résister à la sécheresse grâce à une bonne distribution des eaux de ruissellement et à la réserve d’humidité de la forêt. Le sol est léger, sablonneux, sur un substrat qui mêle grès rose des Vosges et grauwackes volcaniques. L’incroyable échafaudage de murs en grosses pierres de grès retient ce terrain instable, dont la pauvreté limite par ailleurs les rendements. Complanté en riesling, gewurztraminer et pinot gris, le Kitterlé produit des vins de haute race, très concentrés, certes assez lents à s’ouvrir mais d’une longévité exceptionnelle.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni
7) Domaine Marcel DEISS
Jean-Michel Deiss avec son épouse Clarisse siège à Bergheim, à la tête d’un beau et grand vignoble, généreusement dispersé sur 20 kilomètres de coteaux à la ronde.
Fort aujourd’hui de 20 hectares, ils sont tous deux animés par le même goût violent de la vigne. Formé à l’école de Beaune mais surtout à celle de Léonard Humbrecht, l’incisif Jean-Michel déborde en effet d’une énergie vitale pour convaincre quiconque de l’incontestable primauté du terroir dans la genèse d’un grand vin, et en conséquence de la non moins évidente supériorité des grands crus sur les autres vins.
« Plus un vin est grand, c’est-à-dire produit dans des conditions restrictives, plus les caractères gustatifs liés au terroir prennent le pas sur la typicité liée aux cépages ou aux millésimes », affirme Jean-Michel Deiss. Cette forme d’adage peut servir de guide à la présentation des différents terroirs de son domaine.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace »-Michel Mastrojanni-Solar.
Il n’en reste pas moins que l’Alsace viticole peut rendre hommage à ce viticulteur courageux qui, non sans obstacle, a su convaincre l’ensemble de la profession à faire évoluer les règles strictes de l’AOC Alsace.
L’altenberg Grand Cru de Bergheim
Grand Cru classé en 1983. Superficie : 35 hectares. Exposition : sud. L’Altenberg de Bergheim étage ses vignes entre 220 et 320 mètres d’altitude, sur la face pleinement méridionale du Grasberg, qui s’avance comme une sorte d’éperon au-dessus de la plaine d’Alsace. Il est composé de sols marno-calcaires rouges, de faible profondeur, issus de la superposition de calcaires et de marnes du Jurassique moyen et inférieur à forte teneur en fer. Les conditions naturelles sont ici particulièrement avantageuses : dualité pente-exposition, protection de la montagne du Taennchel et de la vallée fermée de Thannenkirch, hygrométrie entretenue par le ruisseau du Bergenbach qui coule à ses pieds. Appréciés dès le XIIe siècle, les vins de l’Altenberg – Riesling et Gewurztraminer – semblent puiser leur caractère dans la majesté de leur coteau : vins puissants, volumineux et virils, conçus pour la garde.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace » – Michel Mastrojanni
8) Domaine Hugel & Fils
Comme le Dolder ou les enseignes de Hansi, la famille Hugel fait partie du patrimoine inaliénable de Riquewihr et, bien au-delà, de l’Alsace tout entière. Il faut dire que cette dynastie vigneronne – qui porte magnifiquement son nom, Hugel signifiant « colline » en alsacien – a de la branche, puisque son ancêtre fondateur, Hans Ulrich Hugelin, s’installa à Riquewihr en 1637.
La maison Hugel, qui vient donc de fêter son 350ème anniversaire, est aujourd’hui aux mains des trois fils de ce dernier :Jean-Philippe (à la gestion), Marc et Etienne, (le premier à la vinification, le second aux relations publiques). Tout ce clan est emmené tambour battant par le pétulant Jean Hugel, le grand « communicateur » de la maison, malicieux personnage plein d’une flamme contagieuse. Ingénieur agronome et œnologue de formation, l’ « oncle Jean » – qui s’occupa longtemps des vignes et de la cave – dépense maintenant sa légendaire faconde dans une étourdissante défense et illustration des grands vins d’Alsace.
La famille Hugel siège au centre même de Riquewihr et produit annuellement une centaine de milliers de caisses de vin, dont 80 % partent à l’exportation.
Le domaine propre des Hugel compte 27 hectares. Couvrant chacun 11,5 ha, le riesling et le gewurztraminer ont la primauté absolue. S’ajoutent à eux près de 3 hectares de pinot gris, une cinquantaine d’ares de pinot noir et une minuscule parcelle (9 ares) de muscat, aux vignes cinquantenaires. Le vignoble est entretenu dans une optique de qualité et de rendement limité : vignes enherbées, pas d’engrais, éclaircissage méthodique. Les vendanges sont faites à la main, en recherchant une maturité optimale. Leurs noms, ainsi que l’appellation grand cru, restent en effet absents de la célèbre étiquette jaune et rouge (des couleurs inspirées, pour la petite histoire, par l’habillage, réputé vendeur à l’époque, d’une grande marque de potage en boîte…). Récoltant des vins de vendange tardive depuis le début du siècle – notamment en 1921, 1929 et, de manière régulière, à partir de 1959 -, elle sut aussi dégager des lots d’exception dans les grandes années de pourriture noble.
Jean Hugel et son père imaginèrent alors de donner un cadre législatif à ces types particuliers de récolte. Ils rédigèrent ensemble une proposition de texte qui, après maintes péripéties, fut adopté en l’état. La « loi Hugel », comme disent certains, venait de faire accomplir à l’Alsace un pas de géant dans le sens de la qualité, en plaçant d’ailleurs très haut la barre réglementaire. Fier auteur, Jean Hugel (qui assume depuis la présidence du Syndicat des producteurs de vins de vendange tardive) insiste notamment sur la notion de démarche volontaire que constitue la déclaration préalable de récolte, comme il se félicite de la rigueur des agréments.
Le riesling notamment lorsqu’il est natif du Schoenenbourg, sait se comporter en seigneur. Récolté en surmaturité sur de vieilles vignes, il produit de mémorables vendanges tardives. Les Hugel se proclament eux-mêmes « pionners de la viticulture alsacienne ». Difficile, effectivement, de leur disputer la paternité des grands Alsaces liquoreux, de nier leur politique en faveur des vins de garde, de contester l’authenticité de leur enracinement alsacien. Bref, difficile de ne pas simplement reconnaître leurs mérites.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace »-Michel Mastrojanni-Solar.
Le Schoenenbourg Grand Cru
Grand cru classé en 1992. Superficie : 53 ha. Exposition : sud, sud-est. Le Schoenenbourg est l’un des plus célèbres coteaux d’Alsace.
Surplombant le rempart nord de la ville – sa pente, très forte, dévale de 380 à 265 mètres -, le « beau coteau » doit ses vertus vinifières à une exposition idéale au-dessus de la cuvette riquewihrienne, ainsi qu’à la qualité de sa terre. Celle-ci repose sur des marnes gypseuses du Keuper (une petite carrière de plâtre fut exploitée en milieu de coteau jusqu’au siècle dernier), recouvertes par des épandages de grès vosgien et de fines couches du Muschelkalk : d’où une heureuse combinaison de sols légers et d’un sous-sol riche et fertile, à bonne rétention d’eau.
Exception faite des quelques parcelles de muscat et pinot gris, le riesling demeure le cépage roi du Schoenenbourg. Il produit ici un vin exceptionnel de finesse et de corps, avec des arômes poivrés et fumés s’éclipsant, au fil du temps, au profit d’un grand bouquet minéral. Garde importante et très belle réussite en vendanges tardives.
Extrait de « Le Grand livre des Vins d’Alsace »-Michel Mastrojanni-Solar.